Romulus

Vous l'avez reconnue, il s'agit bien sûr de la louve du Capitole, allaitant les jumeaux les plus célèbres de la mythologie romaine, Rémus et Romulus.

 

Nés en 771 avant JC, fils illégitimes du dieu Mars, la légende conte qu'ils furent jetés dans le Tibre et sauvés par une louve qui les allaita (la louve étant peut être la femme d'un berger, une prostituée appelée "Lupa" ...).

 

Ils grandissent à la campagne et achèvent leur éducation dans la proche citée de Gabies. Vers 753 avant JC, ils décident de fonder une ville à l'endroit où ils ont passé leur enfance. Mais qui va gouverner ? C'est le conflit et la bagarre. Rémus y laisse la vie. Romulus entreprend la construction de la ville qu'il dénomme ... Rome ! Une ville  où affluent des hommes libres qui ont décidé de changer d'existence. Mais aussi une ville ... sans femmes ! Difficile de progresser dans cette situation !

 

C'est alors l'épisode bien connu de l'enlèvement des Sabines : Romulus invite les habitants des villes voisines à une fête, et il en profite pour leur dérober leurs femmes. Scandale, c'est la guerre !

 

L'issue est incertaine, au point que romains et sabins finissent par conclure une alliance. Le pouvoir se recentre à Rome, les deux peuples se mélangent au gré des mariages et la ville double sa population. Les deux rois (Romulus le romain et Titus Tatius le sabin) règnent en semble en parfait accord pendant plusieurs années ... jusqu'à la mort  accidentelle de Titus ! Romulus est seul au pouvoir et passera le reste de son existence à guerroyer contre ses voisins étrusques, avec lesquels il finira par conclure une trève ... en échange de territoires.

 

Il disparaît dans des circonstances obscures (assassiné par les patriciens ?) en 716 avant JC, après 37 ans de règne, laissant derrière lui un état suffisamment puissant et prospère pour vivre en paix pendant quarante ans sous le règne de son successeur Numa Pompilius.

 

 

 

 

Merci à Adriano Laruccia et à Art Girona de nous permettre de nous remémorer cette histoire, car c'est bien une représentation de Romulus qu'ils nous proposent, avec cette toute nouvelle référence de leur série consacrée aux personnages célèbres de l'Antiquité. 

 

 

Préparation des pièces et premiers assemblages

A l'ouverture de la boîte, la gravure se révèle superbe et la fonderie sans défaut. Elimination des joints de coulée, polissage, etc ... la préparation des éléments ne pose aucun problème. La cape est en 3 morceaux, l'assemblage et l'ajustage risquent d'être un peu délicats ...

 

 

Le personnage tout d'abord. 6 pièces au total : le casque, la tête, les bras, le buste, le bassin avec les jambes. Toutes ces pièces, sauf le casque, reçoivent un piton en fil d'acier de 0,5 mm pour consolider les assemblages. Collage à l'Araldite pour le buste sur le bassin, à la cyano pour le reste. Et quelques petites retouches de mastic (Milliput gris) pour combler les légers écarts résiduels.

 

Et les jambes sont bien entendues munies de solides tiges pour renforcer la fixation sur le socle. Collage à l'Araldite.

 

 

Les autres pièces (la main qui tient la lance, le glaive et le bouclier) sont pitonnées de la même manière. Collage à la cyano. Pitons bien pratiques pour manipuler les pièces en cours de peinture avant montage. Celui du bouclier servira en outre à garantir une fixation solide sur le décor.

 

 

Enfin, la cape. Là encore, des pitons de 0,5 mm sont mis en place pour assembler les 3 morceaux.

 

Le montage ne peut être finalisé que sur le personnage. Il est nécessaire de tordre un peu les pièces pour que tout s'ajuste bien, en particulier sur le bras droit (celui qui tient la lance). La partie pendante doit être bien verticale et il ne doit pas subsister de jeu entre la cape et le bras. Enfin, une reprise de mastic permet de finaliser les plis du tissu. Un peu laborieux tout ça, mais on  y arrive ! 

 

La partie pendante inspire malgré tout assez peu confiance ... Pour ne pas prendre de risque, un trou (visible sur la troisième photo) est percé dans la cape, traverse le bras, puis la partie arrière de la cape. Un piton de 0,5  mm y sera logé au montage. Et un peu de mastic et une retouche de peinture au fond du pli suffiront à faire disparaître le petit trou. Mais c'est pour plus tard ...   

 

 

Essai à blanc pour vérifier que tout se monte bien. Et ouf, la fameuse cape se démonte sans problème !

 

 

Donc démontage, et on sort l'inévitable pot de Humbrol gris mat 28 pour la première couche de peinture. En fait, 3 couches, bien diluées au WS.

 

Tout est recouvert de cette base grise, y compris les parties métalliques (le casque et le plastron par exemple). C'est plus simple et comme la peinture est très liquide, elle ne nuit absolument pas à la finesse des détails de la gravure.

Mise en couleurs

Traditionnelle base de peinture Humbrol, dans des couleurs proches de la version finale. Schématiquement du bleu pour la cape et du blanc pour la tunique.

 

Et on attaque la peinture à l'huile ! Pour faciliter la décoration de la pièce, j'ai choisi de réaliser une ébauche bien aboutie sur les éléments partiellement assemblés, puis de terminer le montage avant de fignoler les détails dans les parties visibles, tout en reprenant si besoin les ombres et les lumières. 

 

Le "pas à pas" qui suit n'est pas chronologique, mais organisé selon les différentes zones de la pièce. J'espère qu'on s'y retrouvera !

La tunique

La base Humbrol grise fait parfaitement l'affaire, la tunique devant être blanche.

 

La palette à l'huile est composée de : blanc de titane, terre d'ombre brûlée, noir d'ivoire, et une petite pointe de bleu indigo pour les ombres les plus profondes.

 

 

Je procède en trois étapes successives, avec un séchage intermédiaire, en augmentant progressivement les contrastes.

 

Petite difficulté : la cape n'est pas en place ; il faut donc bien anticiper les zones d'ombre et de lumière telles qu'elles doivent être placées à l'issue du montage. Pour celà les photos prises au départ sont bien utiles ...

 

Première couche, alors que je viens de poser les pinceaux ; la peinture est encore toute brillante.

Un passage au four accélère le séchage, la peinture est bien matte, mais il y a beaucoup moins de contrastes ...

Deuxième couche. Les contrastes commencent à s'accentuer. Au passage, ébauche du plastron métallique.

Troisième passage en glacis localisés. A ce stade, l'ébauche du blanc est terminé. La finition des parties visibles sera effectuée après la mise en place de la cape.

 

Et mise en place des bandes bleues qui bordent la tunique. Le mélange est le même que celui utilié pour la cape.

Mise en place du motif à base de triangles sur les bordures de la tunique. Le mélange est le même que celui du blanc. Travail à main levée avec un pinceau bien affuté. La peinture est légèrement étendue au WS pour être plus facile à appliquer avec précision et sans surépaisseur. 

Puis détaillage du motif en rajoutant des lignes sombres simulant les coutures et les reliefs. Le résultat n'est pas parfait à ce stade, finitions effectuées après le montage de la cape.

Les cuirs

Cette figurine comporte peu de parties en cuir : la ceinture et les sangles qui maintiennent le plastron métallique.

 

Ici aussi, je les ai ébauchées avant le montage final, en anticipant au mieux les zones d'ombres et de lumières.

 

Pour obtenir un cuir marron, le mélange de base est composé de terre d'ombre brûlée et de terre de Sienne brûlée ; ombre en ajoutant du bleu indigo ; lumières en ajoutant de l'ocre d'or, puis du jaune de cadmium foncé.

Après montage de la cape, les parties visibles seront profilées par une lumière vive sur les arêtes et un trait plus sombre dans les creux.

La cape

Pour commencer, une base de bleu Humbrol n° 77, en 3 couches bien diluées au WS.

La palette à l'huile : bleu indigo, noir d'ivoire, une bonne pointe de terre d'ombre brûlée pour atténuer le bleu, une petite pointe de violet. Lumières au jaune de Naples et au blanc de titane

Et le résultat après séchage au four.

Ici encore, un motif à base de triangles viendra garnir la bordure basse de la cape.

 

Tout d'abord, je place une bande blanche bien régulière avec une première couche de peinture diluée. Après séchage, je retravaille cette bande en ombres et lumières.

Puis je découpe cette bande en dessinant des triangles bleus à main levée.

Les parties métalliques

Essentiellement le casque, le plastron de poitrine et bien entendu le bouclier. Elles seront de couleur bronze.

 

La couleur de départ est du marron Humbrol mat 98, bien dilué. La gravure est très fine ; prendre garde de ne pas empâter le moindre détail ! 

La palette associe de l'encre d'imprimerie couleur or et de la peinture à l'huile : noir de bougie, terre d'ombre brûlée et bleu indigo, ce qui permet d'obtenir diverses nuances de couleurs, tirant soit vers le marron, soit vers le vert.

 

En augmentant la proportion de peinture, on obtient des couleurs sombres. Inversement, en augmentant la proportion d'encre dorée, on obtient des lumières.

Premier passage sur le plastron. Ici encore, attention à la gravure ! Un peu de liquin ajouté aux mélanges précédents, permet d'en diminuer la consistance et facilite leur application en couche fine.

Même principe pour le casque, réalisé en démonstration lors du concours de l'AFM Montrouge 2014 sous la caméra de Figurines TV ...

 

Avant ...

Et après

La carnation

Beaucoup de parties dénudées sur cette pièce. Ici encore une ébauche de la carnation est réalisée avant le montage de la cape, en anticipant les zones d'ombre et de lumière.

 

Mélange classique, à base de terre d'ombre brûlée, terre de sienne brûlée, ocre jaune pâle ; bleu indigo dans les ombres ; ajouts successifs de blanc de titane pour les lumières.

La couleur de base est de la Humbrol chair matt n° 61, un beige rosé assez pâle.

 

Sur ce fond clair, il est toujours difficile (en tout cas pour moi !) d'obtenir, en un seul passage de peinture à l'huile, des variations tonales intenses (ombres prononcées vs lumières fortes), bien fondues et bien opaques. Dans les ombres, la base claire apparaît sous la transparence de l'huile. Pour faire simple, on voit les coups de pinceaux ! Ainsi par exemple sur l'image qui suit, l'arrière de la cuisse.

Un deuxième passage permettra de corriger les choses, en intensifiant les contrastes entre les ombres et les lumières. Raisonnablement ...

 

Voici toujours le résultat de la première couche.

 

 

Et cette étape termine, enfin (!), l'ébauche de la pièce. La cape peut être mise en place, avec précautions, ce n'est pas le moment de faire une bavure de colle. La petite tige mentionnée au début de l'article est enfoncée dans son logement avec une goutte de colle ; une boulette de Milliput vient boucher le trou.

 

Le glaive, également ébauché séparément, est collé. Les opérations peuvent se poursuivre ...

Il s'agit essentiellement de retravailler la tunique en ombres et lumières pour améliorer les contrastes sur les parties visibles.

 

Toute la carnation est également reprise. Dans ce cas, les contrastes restent modérés, par goût personnel.

 

Et je reviens sur tous les détails pour les préciser.

 

Zoom sur le visage aux différentes étapes précédentes

 

Au départ, juste après la couche de base à la peinture Humbrol.

 

Comme presque toujours sur les pièces de A Laruccia, les pupilles sont gravées en creux, comme c'est souvent le cas sur la statuaire antique.

 

 

Loin de présenter une difficulté, cette particularité facilite la pose d'une touche de lumière qui donne de la vie au regard.

Après l'ébauche à la peinture à l'huile.

 

Le visage commence à devenir expressif (il a l'air sur de lui le bonhomme). Mais l'ensemble manque de précision, de contrastes, les fondus sont à améliorer.

 

Les photos en gros plan sont impitoyables, mais précieuses pour corriger les détails ... Alors, surtout ne pas s'arrêter à ce premier résultat ! En travaillant encore un peu, on peut améliorer nettement les choses.

Après le second passage à l'huile.

 

Les éclairages sont intensifiées, afin d'augmenter l'impact du visage en le rendant plus lumineux. Le regard est précisé, les sourcils sont dessinés (délicat, rien de tel que des sourcils mal faits pour gâcher un beau visage !). La barbe est reprise avec un jus de peinture sombre, etc ...

 

Il convient d'y aller très progressivement, en posant très peu de peinture et soignant les fondus. Pinceau bien affuté indispensable pour être précis.

La fin approche ! Le personnage va pouvoir retrouver sa lance et son bouclier et rejoindre son socle.

 

Un socle en olivier du modèle utilisé pour toutes les pièces de cette série. Sur ce petit carré de 35 mm de côté, ça passe, juste, mais ça passe, en mettant à profit la diagonale ...

 

Le décor est un simple sol rocailleux : une couche de Milliput pour prendre les empreintes du personnage, perçage pour les tiges de fixation, mise en place de petites pierres et de sable à la colle blanche diluée dans de l'eau, un peu de peinture marron ...

 

 

Bien entendu, tout ceci a été préparé à l'avance ! Il reste juste à  terminer le terrain autour des pieds lorsque la pièce est collée en place, à l'araldite.

 

Des retouches, encore des retouches pour peaufiner les derniers détails ... Et enfin les photos finish. 

 

 

 

Et voilà, Romulus rejoint la vitrine ! Encore une belle réussite de Adriano Laruccia.

 

Une pièce qui n'est peut-être pas vraiment à recommander aux débutants : le montage n'est pas des plus aisés, et il est indispensable de bien avancer la décoration avant de procéder à l'assemblage final, ce qui est toujours un peu délicat.

 

Mais pour les amateurs de la période, il sera difficile de se passer de Romulus, personnage célèbre s'il en est de l'Antiquité romaine.

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Commentaires: 5
  • #1

    charles (lundi, 28 avril 2014 23:03)

    Une superbe réalisation de ta part, bravo.
    Je suis tout à fait d'accord avec ta conclusion, mais quel plaisir de succomber à cette pièce.

    encore bravo

  • #2

    Duck (mardi, 29 avril 2014 13:39)

    Bonjour Jean-François, une magnifique réalisation il ne reste plus à la marque que de prévoir la sortie de Rémus, son frère et la louve, bien sur!
    Au plaisir.

  • #3

    Papouille (samedi, 10 mai 2014 10:49)

    C'est chaque fois un plaisir immense de suivre tes pas-à-pas qui fait paraïtre la peinture à l'huile très fascinante et presque .. facile. Mais la mise en route est plus complexe.... Tu apportes une personnalité différente et particulière à chaque pièce réalisée, par le choix de la palette et l'équilibre des couleurs ! Bravo, une référence magnifique pour tous les passionnés huileux de figurines. J'adore!

  • #4

    Francis (samedi, 07 juin 2014 19:09)

    Bonjour Jean-François, toujours un plaisir pour les yeux de voir tes réalisations, dès qu'il y en a une de finie, on attend la suivante avec impatience

  • #5

    Duck (lundi, 24 février 2020 13:27)

    Bonjour Jean-François, je viens de faire l'acquisition de cette figurine que j'ai pu comparer avec le guerrier villanovien de chez "Master Class".
    Quelques similitudes qui peuvent donner envie de modifier ce "Romulus" en chef villanovien. Ces deux personnages sont dans ta vitrine et la couleur de leurs tuniques sont très proches.
    Je vais m'en inspirer car le blanc est une teinte très intéressante à travailler.
    Cordialement,
    J.